Elmar Tophoven 100 ans (1923-1989)

Voici la traduction (automatique) d'un article qui vient de paraître dans le Geldrische Heimatkalender édité pour l'année 2023. Il s'agit d'un almanach local pour lequele Elmar Tophoven a déjà traduit en allemand un long poème en patois qui évoque la visite de Napoléon à Straelen et la façon dont on lui a fait oublier son idée de réquisitionner la cloche de l'église. L'article de l'édition 2023 est signé Jonas Tophoven mais en fait c'est Erika Tophoven qui l'a écrit. L'idée de regrouper les informations biographiques par tranches de décennies est liée à l'idée de produire 7 tableaux portant sur les périodes 1923-1933, 1933-1943 et ainsi de suite. 

 

Une rétrospective de sa vie en sept sauts dans le temps

Il y a cent ans, le traducteur littéraire Elmar Tophoven naissait à Straelen. C'est là qu'il est mort à l'âge de 66 ans, après une vie mouvementée. Au cours des trente années suivantes, son épouse Erika Tophoven-Schöningh et ses deux fils Jonas et Philipp se sont efforcés de classer son héritage et d'élargir la collection par leurs propres travaux de recherche. Depuis 2019, les archives privées ont trouvé leur place dans la maison familiale de Straelen, Südwall 7. De son vivant, Elmar Tophoven était surtout connu comme le traducteur allemand de Samuel Beckett. Les archives documentent, à l'aide de manuscrits de traduction, de milliers de fiches, d'enregistrements sonores et de disques ainsi que de textes de traduction encore inédits, près de quarante ans de travail d'Elmar en tant que traducteur littéraire et médiateur entre la France et l'Allemagne. L'un des points forts de ces archives est l'étroite collaboration qu'il a entretenue pendant des décennies avec Samuel Beckett, l'auteur irlandais vivant à Paris qui a reçu le prix Nobel de littérature en 1969. Elles contiennent également un matériel important sur les débuts et le développement progressif de l'idée de collège ainsi que sur les activités de la maison sous sa direction. Les archives privées sont également des archives familiales. Des centaines de lettres de toutes les périodes de sa vie aident à retracer l'évolution variée d'Elmar, de l'enfant de Straelen au fondateur du Collège. Tous les documents conservés témoignent d'un lien étroit avec sa région natale du Bas-Rhin ainsi qu'avec le pays d'origine de sa mère : la Hollande.

1923...

Le père, Franz Tophoven, est le fils aîné de Joseph Tophoven, détaillant de manufactures literies et confections à Wachtendonk. Deux de ses fils font des études, Franz devient médecin et s'installe après la Première Guerre mondiale dans le village voisin de Straelen. Son prédécesseur, le Dr Breuer, avait quitté son cabinet peu après la guerre pour des raisons d'âge. Le nouveau médecin rend visite à ses patients de jour comme de nuit, d'abord en moto, puis avec son Opel P4. Il est également un obstétricien apprécié et arrache même les dents en urgence le dimanche. Un jour, il soigne une jeune Hollandaise de Haarlem. Un lien solide se crée entre Christine Gründemann et Franz Tophoven. Les parents de la mariée abandonnent leur entreprise de confection à Haarlem et, grâce à un taux de change favorable, s'installent temporairement à l'hôtel Nölken à Herongen, où le mariage est célébré en 1921. Les premières années de mariage, le couple loue aux dames Hollen la maison dite Hollen à Straelen, dans la Kuhstraße, où le docteur a également son cabinet, en face de l'hôtel von Lom et du Katharinenstift. En 1929, le jeune couple et ses trois enfants, Elmar, Marga et Dieter, construisent la maison sur le Südwall. C'est là que le médecin exercera désormais et que deux autres enfants, Heinz et Resi, viendront au monde. Dans la famille, on parle le haut-allemand ou le néerlandais. Elmar grandit dans le bilinguisme, il est souvent invité chez ses grands-parents hollandais, qui ont entre-temps déménagé à Nimègue.

1933...

Commence alors une décennie lourde de conséquences et d'aveuglement. Le petit roi du Schützenfest, très éveillé, grandit dans le monde nazi et devient bientôt chef d'enseigne à Straelen. Il tient un journal, souvent illustré de dessins amusants. En 1937, il quitte l'école du rectorat de Straelen pour le lycée Hindenburg de Geldern. Il s'agit maintenant de réviser le latin avec son père, mais le service pur les "louveteaux du nazisme" l'occupe également de plus en plus. On lit plusieurs fois "Besprechung in Geldern beim Bann" (réunion à Geldern à la direction des "louveteaux") lorsqu'il est encore nommé Jungstammführer en décembre 1939. Mais il est aussi beaucoup question de sorties au cinéma, de répétitions de théâtre, de cours de danse et de premiers flirts, puis à nouveau d'engagement dans les récoltes, de plumage du lin et, dès la fin de l'année 1939, d'assistance aux blessés. Au lycée de Geldern, des cours d'équitation sont également dispensés dans les classes supérieures. L'équitation à Baersdonk ou près de Paesmühle, aujourd'hui sur la Zilly sauvage, même le saut et avec des éperons. C'est encore un plaisir, mais la désillusion ne tarde pas à venir. Le 3 octobre 1940, l'ordre de convocation au service du travail du Reich (RAD) arrive. L'autorité scolaire appose la "mention de maturité" sur le certificat de libération du jeune homme de dix-sept ans, et le 9 décembre 1940, il commence sa formation militaire à Dortmund. Malheureusement, il n'est pas conducteur de véhicule comme il l'espérait, mais il vient aux chevaux et y restera, d'abord dans le nord de la France, puis bientôt en Russie, où il se déplace avec les petits poneys résistants à toute épreuve dans la boue, la vase, la neige et la glace. Des colis de la maison et des livres, surtout des manuels scolaires français, aident à supporter la vie de soldat. Le père et le fils correspondent, même depuis la Russie, en français de temps en temps, car le père avait appris des langues étrangères en autodidacte infatigable : le français, l'italien et plus tard même quelques bribes de russe, afin de pouvoir mieux traiter les prisonniers de guerre. Elmar survit à l'hiver russe, mais contracte le typhus au printemps 1942. Très affaibli, il est renvoyé dans son pays pour quelques semaines. Mais ensuite, il part une deuxième fois pour la Russie, sur le front, avec pour objectif Stalingrad. La ville, âprement disputée, tombe avant qu'il n'y soit envoyé par avion avec les réserves de la 6e armée. Il est miraculé.

1943...

L'enfer en Russie est suivi de quelques mois de calme à Laon, dans le nord de la France. Elmar profite de ses moments de liberté pour améliorer ses connaissances en français et prendre des cours privés. Entre-temps, il fait partie d'une compagnie d'infirmiers qui est transférée en Italie au début de l'automne. Il se met alors à l'italien et correspondra bientôt avec son père en italien. En octobre, il est grièvement blessé lors d'une attaque aérienne en rase-motte dans une voiture de la Croix-Rouge, une balle l'atteint au poumon et lui traverse le ventre. Après des semaines d'hospitalisation à Chieti et Pavía, il reprend des forces et peut commencer à étudier la médecine à Bonn après sa guérison. Peu avant la fin de la guerre, mobilisé une nouvelle fois, il est fait prisonnier de guerre par les Américains à Weilburg/Lahn et reste encore un an et demi dans un camp de prisonniers américain sur le sol français jusqu'au printemps 1946. Le capitaine l'autorise à écrire un journal de camp, et c'est ainsi que naît le Stacheldraht-Express, un journal écrit quotidiennement à la main en lettres d'imprimerie et illustré par des codétenus talentueux, épinglé sur un mur extérieur du camp et destiné à apporter un peu de réconfort aux plus de mille prisonniers. La plupart des exemplaires uniques ont été conservés, tout comme le texte d'une revue "La fusée des rêves" et d'autres textes de sa plume. Le 6 mars 1946, le jour de son vingt-troisième anniversaire, il sert d'interprète à la porte du camp lors d'une négociation avec un policier français. Il mentionne qu'il aimerait bien traduire une farce de Molière, et le soir même, on lui remet deux volumes de Molière. L'interminable captivité devient ainsi plus supportable. Il se met aussitôt à traduire la pièce de théâtre "Le médecin malgré lui" et peut même la jouer dans le théâtre construit par les prisonniers. Pour Elmar, c'est le début de sa carrière de traducteur. Après sa libération, il poursuivra d'abord ses études de médecine à Mayence. Mais il est attiré par les études théâtrales, où il fait notamment la connaissance de Hanns-Dieter Hüsch, avec qui il restera ami toute sa vie. Dans une Mayence bombardée, affamée et glacée, les étudiants éprouvés par la guerre célèbrent leur survie lors de fêtes étudiantes auxquelles Elmar apporte des scènes de théâtre et des chansons entraînantes. Pour gagner l'argent nécessaire à ses études, il traverse en 1947 plusieurs localités du Bas-Rhin en diligence avec ses amis, avec au programme la comédie française Le Joueur de J. F. Regnard. En novembre 1949, le futur étudiant en théâtre est confronté à une décision d'une grande portée : Obtenir un diplôme à l'université Johannes-Gutenberg de Mayence ou partir pour trois ans à la Sorbonne en tant que premier lecteur d'allemand après la guerre. Il fait le saut à Paris, sans se douter qu'il y vivra et y travaillera pendant quarante ans.

1953...

L'année commence à Paris avec la première retentissante de la pièce de théâtre En attendant Godot. Elmar, qui s'est déjà exercé à la traduction de pièces de théâtre et de pièces radiophoniques en plus de son travail d'enseignant, abandonne sa thèse, se lance dans la traduction de Godot et ose rester à Paris en tant que traducteur littéraire indépendant. Sa minuscule mansarde d'hôtel, que plus d'un visiteur de Straelen a également connue, devient le premier point de chute de nombreux lecteurs d'édition, rédacteurs radio et journalistes allemands. Le 14 septembre 1957, le Bas-Rhinois épouse Erika Schöningh, une Frisonne de l'Est, qui élargit les compétences linguistiques d'Elmar grâce à ses connaissances en anglais. Leurs deux fils, Jonas et Philipp, hériteront de la passion du grand-père et de leurs deux parents et construiront leur métier sur cette base.

1963...

C'est l'année du décès du père, une perte très douloureuse pour le fils. Il lui était reconnaissant de ne pas l'avoir poussé vers la médecine, mais de l'avoir incité très tôt à apprendre les langues. En revanche, l'engagement politique du foyer familial a été pour lui un fardeau en France dès le début. De nombreux amis et connaissances étaient des émigrés et avaient connu des souffrances indescriptibles. Comment ses parents avaient-ils pu s'engager à ce point dans le mauvais camp ? Ce sentiment de culpabilité était particulièrement lourd vis-à-vis de Paul Celan, qui avait perdu ses deux parents, exterminés. Il a néanmoins trouvé une relation de confiance avec le poète vénéré et lui a succédé en 1970 comme lecteur d'allemand à l'Ecole Normale Supérieure.

1973...

Il y a cinquante ans, le travail de traducteur littéraire était généralement peu reconnu. C'était une existence solitaire, mal rémunérée et incertaine. Le mot magique Toledo devait y remédier. A la recherche de nouvelles voies de collaboration en matière de traduction, Elmar a entendu parler de l'"école de Tolède" qui, aux 12e et 13e siècles, avait attiré dans la ville médiévale des personnes avides de connaissances de nombreux pays européens. Les trésors des bibliothèques arabes étaient traduits oralement en espagnol par des juifs convertis et les résultats étaient traduits en latin par d'autres chrétiens. Ne devrait-on pas essayer de créer quelque chose de similaire entre collègues ? 1973 a été une année de crise pour les traducteurs. Certains craignaient de perdre des commandes, et déjà l'ordinateur menaçait d'être un futur concurrent. "Deutsch von Bull" ou "Aus dem Französischen von IBM 704", tel est le titre d'une conférence qu'Elmar a donnée dans ces années-là. Ne pourrait-on pas créer un foyer pour les traducteurs âgés en difficulté ? Les plus âgés ? Pourquoi ne pas réunir les jeunes et les anciens sous le même toit, pour un échange commun, un enseignement et un apprentissage ? Il y avait à Wachtendonk la maison Thomassen, une petite propriété de la famille Tophoven, qui était justement vide, et il se trouva déjà un ami architecte pour dessiner les premiers plans de construction. Mais la ville de Straelen, plus forte économiquement, intervint et Elmar trouva un défenseur important, le ministre de la justice de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, le Dr Diether Posser, un ami des jours de guerre vécus ensemble à Straelen. Le rêve est devenue réalité : en janvier 1978, le premier Collège européen des traducteurs est fondé à l'hôtel de ville de Straelen, la "nouvelle école de Tolède" dans le Bas-Rhin.

1983...

Elmar a porté l'idée dans toute l'Europe et même aux États-Unis. Il réussit à convaincre cinq personnalités de renom de le parrainer : les écrivains Samuel Beckett, Heinrich Böll et Max Frisch ainsi que les professeurs Robert Minder du Collège de France à Paris et Mario Wandruzka, le génial linguiste de l'université de Tübingen. Après une période d'essai de 7 ans dans une petite maison de la Mühlenstraße, la grande maison de la Kuhstraße 10 a pu être ouverte le 24 avril 1985, précisément dans le bâtiment où Elmar Tophoven avait vu le jour il y a cent ans. La France, l'Espagne, l'Italie et l'Angleterre suivirent bientôt le modèle de Straelen avec leurs propres fondations à Arles, Tarazona, Procida et Norwich. Depuis, des établissements similaires ont vu le jour dans d'autres endroits.

Conclusion

En 2023 paraîtra en France une thèse de plus de cinq cents pages consacrée à la traduction transparente développée et pratiquée par Elmar. La jeune chercheuse Solange Arber y analyse la méthode de sa méthode de travail, qui date d'une époque où la traduction assistée par ordinateur était déjà prévisible. Son approche visant à rendre visible l'effort créatif du traducteur humain, sans lequel toute œuvre littéraire perd son authenticité, était une tentative de revaloriser son activité.